little lion man

Depuis qu’ils avaient mené ces attaques pour distraire les hommes de Caldwell afin de dérober cet arbre généalogique de Merlin et libérer Maxim, c’était la folie à St James. Ce fichu parchemin était protégé par un sortilège complexe, ils s’en étaient doutés, mais ça ne rendait pas la chose moins frustrante. Mais surtout, Sévan et les autres n’avaient pas libéré que Maxim des griffes du Ministère. Il y avait d’abord Sylas, qu’elle avait cru parti loin d’ici d’après ce qu’Alexis lui avait dit, mais surtout, Aleksander. Qui était censé être mort, tué par Wheland. Ils l’avaient pleuré, sa meilleure amie avait été inconsolable, ça l’avait même poussée à quitter St James. Et finalement, il ne l’était pas ? Les morts ne revenaient pas à la vie – du moins, la plupart – pas comme ça. Ils l’avaient gardé tout ce temps enfermé, sans que personne ne sache rien, sans qu’aucun agent double ne puisse leur donner cette information ? Et pareil pour Sylas ? Siane était heureuse de les voir, même si leur état lui avait brisé le cœur. Aleksander était un de ses amis les plus proches – du moins, il l’avait été – et le savoir en vie était un soulagement mais… C’était louche. C’était bien trop louche.
Elle ne parvenait pas à s’enlever cette idée de la tête et ça la rongeait, parce qu’elle se sentait coupable de penser que tout ceci pouvait être une horrible machination. Aleks était vivant, ne devrait-elle pas simplement se réjouir pour lui et pour Alexis ? Elle n’y parvenait pas. Elle avait fait part de ses doutes à Sévan qui l’avait écoutée attentivement et même s’il n’avait rien dit, Siane savait qu’il les partageait. C’était son rôle, douter d’absolument tout, remettre en question les choses qui paraissaient les plus évidentes. Siane termina sa tasse de café et passa une main sur son visage. Elle était plus pâle que jamais, à force de rester enfermée à St James. Et puis, elle était épuisée. Autant dire qu’elle dormait très peu, déterminée à trouver un remède pour les Marqués et rongée par tout un tas de questions dont elle ne pouvait pas trouver la réponse.

Elle déposa sa tasse dans l’évier et se retourna pour faire face à Lena qui ne semblait pas beaucoup plus en forme. Elle avait après tout trois patients à gérer et ils étaient vraiment dans un sale état. « Comment vont-ils ? » demanda-t-elle et la blonde haussa les épaules. « Aleks et Sylas sont endormis, Maxim a faim, c’est plutôt bon signe ? » dit-elle en esquissant un sourire auquel Siane répondit. « Tu veux que je m’en occupe ? Tu as l’air épuisée, » proposa l’ancienne Gryffondor et elle la vit hésiter, certainement peu encline à laisser son travail à quelqu’un d’autre. « Si c’est juste lui apporter à manger, ça ira, non ? » La Blackadder finit par accepter. Siane n’avait pas vu Maxim depuis qu’il était arrivé à St James, couvert de plaies et d’hématomes, inconscient. Avec tout ce qu’il y avait encore à faire, elle n’avait même pas eu le temps d’aller le voir et de lui adresser la parole. Elle s’en voulait terriblement et détestait ne pas être utile. Maxim était blessé et si elle connaissait certains sortilèges, ça ne faisait pas d’elle une professionnelle. Et il n’y avait pas grand-chose à faire non plus pour l’aider, lorsqu’il dormait des heures pour se rétablir. Seulement attendre. Mais s’il était conscient, s’il reprenait des forces au point d’avoir véritablement faim, elle se sentirait peut-être un peu moins inutile.

Sous les conseils de Lena, elle opta pour les restes d’une soupe qu’Alexis et elle avaient préparé la veille, avec quelques toasts, pour qu’il puisse avaler quelque chose de consistant s’il en avait la force. Elle se retrouva aussi avec deux fioles sur son plateau, qu’il était censé prendre après son repas, sous les recommandations de la Médicomage. Après lui avoir conseillé d’aller dormir un peu, Siane se rendit à l’étage et s’arrêta devant la porte de la chambre de Maxim. Calant le plateau sur un bras, elle frappa doucement contre le montant de l’autre et ouvrit la porte doucement. La pièce était peu éclairée et sur le lit, au fond, le jeune Newton était calé contre une pile confortable d’oreillers. Il avait meilleure mine. C’était loin d’être parfait, mais les plaies et les hématomes commençaient à disparaître, petit à petit. Sa tignasse noire était emmêlée et même d’ici, Siane pouvait voir qu’il avait terriblement maigri. Mais au moins, il avait les yeux ouverts. « Lena m’a dit que tu avais faim, » dit-elle d’une voix douce avant de refermer la porte derrière elle et de s’avancer jusqu’au lit. La gorge nouée, elle s’arrêta à côté de lui et déposa son plateau sur la table de chevet. Ils ne s’étaient pas adressé la parole depuis des mois. Depuis la dernière fois qu’ils s’étaient vus, avant que Caldwell ne lui mette la main dessus. Elle n’avait pas entendu la voix de Maxim, ni croisé son regard depuis trop longtemps et si tout ceci lui avait affreusement manqué, elle avait tout fait pour étouffer cela profondément, afin d’être capable de continuer à travailler.
Aujourd’hui, alors qu’il se trouvait là devant elle après avoir été torturé, Siane se reprenait tout en pleine face. Elle lutta contre son envie de pleurer, parce que ce n’était pas le moment et Maxim n’avait absolument pas besoin de voir ça. Au lieu de cela, elle avança une main vers son visage et de son index, écarta quelques mèches de son front. « Tu penses pouvoir manger tout seul ou tu préfères profiter de ton état pour te faire nourrir ? » le taquina-t-elle doucement. C’était un peu son mode de défense, l’humour. Elle aurait préféré l’écraser contre elle, dans une étreinte désespérée, lui dire à quel point il lui avait manqué et s’excuser de ne pas être venue plus tôt. Mais elle se serait très certainement mise à pleurer alors elle préférait éviter. Et puis, Maxim n’était définitivement pas en état d’encaisser une étreinte à la Callaghan.